Livre de bord – Semaine 12
Du Lundi 3 juillet au dimanche 9 Juillet
De l’ile aux Ours à Tromso
Lundi 2H du matin.
Bien cachés derrière notre caillou, lentement s’écoule les heures. Le vent souffle à plus de 40 nœuds et bien secoués dans notre beau shaker à voile nous laissons gentiment se décoller la pulpe du fond. Le bateau travaille mais semble encaisser la charge. Il n’y aurait pas cette barre rocheuse qui nous fait du clin de l’œil depuis une légère bascule de vent, nous serions presque sereins. Nous la surveillerons de prêt toute la nuit, en espérant ne pas devoir être dans l’obligation d’engager une manœuvre dans ces conditions.
Vers 18H cela ventile encore puissamment mais le plus gros est passé. Eole semble ne pas vouloir trop présumer de nos forces, et nous faire l’amabilité de partir s’époumoner un peu plus loin. Merci à lui. C’était une belle expérience à vivre mais point trop n’en faut.
Nous décidons d’attendre jusqu’au mercredi que la houle du large se calme elle aussi. A bord du loft, l’attente n’est pas si sévère et nous nous avérons assez costaud au jeu du vivre ensemble dans un minimum d’espace. Notre cohésion, c’est notre force.
Mardi en fin d’AM le soleil fait son apparition, le spot prend des couleurs bretonnes, et nous pouvons ouvrir le couvercle de la cocotte pour regarder ce qui se passe dehors. Une flottille impressionnante de full Mar nous tient compagnie. Regis sort une canne et ramène en quelques minutes une morue aux mensurations extraordinaires. Fabien tente à son tour l’expérience et obtient le même résultat. L’endroit s’avère redoutable pour la pêche. L’ile est complétement inhabitée et manifestement les poissons d’ici ne doivent pas croiser souvent d’hameçons : en moins d’une demie heure nous aurons rempli la cambuse.
Notre chef passe alors à la phase industrielle et après nous avoir servi une fabuleuse chaudrée, engage le processus de salaison pour que nous puissions conserver le poisson.
Mercredi matin, le vent souffle encore à 30 noeuds mais nous décidons d’engager. Les prévisions sont bonnes jusqu’à l’arrivée à Tromso: vent d’est, soleil, impeccable pour finir en beauté.
Nous quittons le mouillage vers 14H. Trois ris dans la GV, trinquette, Northabout s’élance dans la descente. Les conditions sont idéales pour lui et il se comporte magnifiquement. Bel instant de voile, on se régale.
Vendredi matin, après une navigation très plaisante et sans histoire, nous entrons dans les fjords Norvégiens. Encore quelques miles et nous serons à Tromso : notre terminus. Il fait un temps magnifique et nous avons le sentiment d’avoir été parachuté dans l’été. Nous ressortons nos tee-shirts des équipés et c’est bien agréable. Nous filons lentement, très lentement, mais à la voile, vers notre destination finale en essayant de profiter du cadre exceptionnel et de ces derniers instants sur le bateau.
Vers 19H , après une ultime belle et délicate manœuvre de Fredo, nous sommes à quai dans le vieux port. Redge savoure l’instant, il a rempli son contrat avec les honneurs, et sa mission s’arrête là. Le voyage s’est très bien passé et aucun incident majeur n’est à déclarer. Une belle réussite et une sacrée expérience pour nous tous. Rompez les rangs, vous pouvez fumer: il est l’heure d’aller apporter sa petite bière à l’édifice. Tromso s’avère très agréable en cette saison, et c’est tant mieux car nous avons deux jours à y passer pour attendre Yann, le skipper qui doit convoyer Northabout à la Rochelle. Entre grand nettoyage de printemps pour le bateau, petits cafés en terrasses, et soirées culturelles dans les bars de la ville, ils seront bien occupés.
Voilà…L’aventure s’arrête là.
Merci les potos c’était bien. Et même très bien. A la prochaine, peut être même avant.
Epilogue:
Lundi matin 6H, nous prenons, le bus pour Narvik ou un premier train nous attend. Ca faisait longtemps que nous n’avions pas emprunté la route. Nous renouons avec le voyage en mode « valise » : c’est différent, mais c’est pas mal non plus. Les paysages défilent, nos pensées s’envolent, chacun dans sa petite bulle on refait le match. A part Fredo qui a égaré la télécommande qui permet de faire taire le druide, nous comatons gentiment et récupérons. Vers 10 H nous sommes à la gare : 5H d’arrêt avant d’enchainer sur 3 jours et deux nuits de voyage de périple ferroviaire à travers la Norvège, la Suède, le Danemark et la France. Une dernière petite trempette sous le soleil, dans les eaux bleues turquoises des Lofoten et c’est parti. La première partie suédoise fut intéressante, avec des incursions à flanc de montagne et des paysages magnifiques, la suite plus laborieuse. Mais peu importe, nous sommes rodés à l’inconfort et ce temps lent nous permet de reprendre contact progressivement avec la nuit, les contrôleurs, les retards de train, les villes, le monde et tout ce qui nous était étranger depuis quelques mois.
Mercredi vers 19 heures, nous arrivons en gare de de La Rochelle, passablement fatigués, mais dans la joie de retrouver nos chéries (qui nous attendaient depuis des semaines sur le quai). Elles nous ont tellement manqué. One Love.
Bon retour chez vous les marins de l’extrême ! Des accolades pleine d’admiration et une bise en + pour Pat !
Quel magnifique voyage, vous avez gentiment passé sous silence vos grands moments de stress pour nous rendre l’épopée plus belle, mais il fallait avoir du courage pour un tel périple, bravo les champions, hâte de vous retrouver pour échanger de vive voix (avec des trémolos j’espère !).
Des bises et des accolades à n’en plus pouvoir, à très vite !